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le blog politique de michelle meyer
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10 novembre 2006

PROPOS SUR LA CENSURE QUI SE MASQUE

A propos de la censure et de la manipulation des esprits.

 

 

 Quand la manipulation de l’opinion éclate au grand jour.

 J’ai pu constater que bien des gens deviennent conscients que ce qui se dit, s’écrit ou se visionne est d’une teneur si monolithique qu’il doit y avoir des raisons structurelles qui contribuent à une standardisation de la pensée. Ce mal s’est mis en place progressivement depuis 30 ans. J’en avais pris le parti de n’en rien dire sauf dans un opuscule Le droit d’écrire, le droit d’être lu publié en 1980 à l’occasion d’un colloque sur l’édition à Bourg-en-Bresse, tant le sujet exige, pour être entendue, une prise de conscience accompagnée d’un questionnement sur les blocages du système et la volonté politique qui s’y attache.

 A l’opproche d’échéances électorales, il n’est pas besoin d’être un grand clerc pour constater, sur les chaînes télévisées, des changements tant au niveau du comportement et des propos des commentateurs que des personnalités invitées. Une propagande sous-jacente téléguide le résultat des urnes. La plupart des individus contractent des habitudes d’opinion et de croyance suite à la répétition et au phénomène d'imitation, ainsi se forge une opinion publique que les sondages prétendent refléter.

Très souvent, les résultats électoraux ne sont pas à l’image de ceux attendus. Plutôt que de remettre en cause la pratique des sondages, la presse parle  « d’une France en crise » c’est-à-dire l’existence d’une fracture entre l’opinion privée et l’opinion publique. En clair, les citoyens votent « en conscience » mais répondent aux sondeurs en fonction de la pression sociale sur l’opinion. Tout se passe comme si les citoyens avaient un doute sur la démocratie et préfèrent exprimer leur choix véritable dans le secret de l’isoloir plutôt que de répondre aux sondages avec sincérité en supposant que les questions posées soient sans équivoques.

 
La manipulation des esprits intéresse tous les citoyens.

 Depuis longtemps, il est décidé par les détenteurs de pouvoir de ce qui doit être dit, vu, lu et pensé. En 1980, Jérôme Lindon des Ed. de Minuit refuse de venir au colloque de Bourg-en-Bresse sur l’édition, pour lui, « c’est déjà trop tard ». Dans l’opuscule « La FNAC et les livres  » de 1978, Jérôme Lindon s’élève contre l’idée de profit immédiat. « En 1952, l’année de sa publication, on n’a vendu que 125 exemplaires d’En attendant Godot », écrit-il et d’ajouter : « Renoncer à sortir ces livres-là, c’est tuer dans l’oeuf notre patrimoine de l’an 2000 ». Dans le journal Le Monde, cet éditeur disait encore :  «Des centaines d’auteurs, chaque année, ne verront pas le jour. Mais personne ne s’en apercevra; qui remarque l’absence d’un inconnu? C’est dans dix ans, vingt ans, qu’on constatera les dégâts, et il ne sera plus temps d’y remédier... ».

 D’aucuns m’objecteront que le choix des livres est multiple en librairies mais ce qui compte sur le plan de la création, ce n’est pas le quantitatif mais le qualitatif. «La France », écrit encore Jérôme Lindon, « sera définitivement condamnée à consommer des réimpressions, des sélections de clubs et ces romans qu’on appelait naguère de la littérature de gare ». ARTE commentant la foire internationale du livre de Francfort dit que ce n’est pas dans ce type de foires qu’il faut aller chercher les livres qui resteront dans le patrimoine mais dans la microédition. Et j’ajoute que les livres nés dans la microédition resteront confidentiels car ils vont se heurter à la concentration de la distribution et à celle de la presse dont les critiques littéraires appartiennent aux trusts lesquels financent, il est vrai, une partie des journaux par leurs encarts publicitaires.

 La censure économique semble être acceptée par le public tant le principe de faire de bonnes affaires est devenue une référence de valeur si bien que J.P Barou du Seuil ne cherche pas à choquer quand il avoue à Télérama : « Il faut des noms connus pour faire vendre... On n’a plus cherché des écrivains mais des noms ». Au nom de la rentabilité (qui fut la source du scandale du sang contaminé), les maisons d’édition ont été appelées à se concentrer en trusts puis à abandonner leur pouvoir décisionnelle aux trusts de la diffusion. Dès lors, il devenait simple de mettre les publications sous haut contrôle de surveillance quant à leur contenu. La censure économique a pris le visage de la censure politique.

 

La droite ultra s’organise.

 Je me suis heurtée à la censure politique peu après que Jérôme Lindon ait publié son opuscule contre la politique des FNAC ce qui lui valut un procès et fit écrire à J.Claude Marrey dans Le Monde  : « J’appartiens à une génération où les poursuites engagées contre les Ed. de Minuit rappellent d’étranges et fâcheux souvenirs ». Je me rends donc aux éd. Stock pour récupérer un manuscrit, grande fresque sociale où je fais une psychanalyse de l’Etat. Je suis reçue avec empressement au niveau du secrétariat de direction et mon interlocutrice affirme la qualité littéraire de l’ouvrage mais les idées exprimées feront que le livre ne sera pas diffusé même s’il était édité. La femme est si émue que je suis moi-même bouleversée face à ces gens de pouvoir sans pouvoir. « Jusqu’en 1976 », me dit-elle, « nous aurions pu publier votre livre ». Je n’ai jamais publié ce manuscrit malgré les propositions d’associations pour le lancer par souscriptions car la France à laquelle je viens de me heurter m’a profondément ébranlée. J’ai trop bien compris les imbrications du politique et du capital pour savoir que je serai un écrivain marginal malgré moi. Ne pas me soumettre à des impératifs idéologiques que je récuse, c’est me marginaliser, ce n’est là qu’un moindre mal.

 Avec l’avènement du giscardisme, les restructurations sont allées bon train. Matra qui fait fortune avec les ventes de missiles a fait main basse sur Hachette; et les éd. Stock passent, à leur tour, sous la férule de Matra-Hachette. C’est la première fois en France que les marchands d’armement disposent d’une telle puissance au niveau de l’information et de la diffusion de la pensée et des connaissances.

Toujours dans les mêmes temps, alors que Monsieur Chirac est devenu le premier maire de la ville de Paris et a créé le RPR où l’on trouve alors A. Juppé, J. Toubon, B. Mégret, Y. Blot, J. Médecin..., lorsqu’il est question de régionalisation, le Maire convie « l’élite  parisienne » pour la rassurer comme quoi le pouvoir culturel et décisionnel resteront concentrés à Paris. Monsieur Chirac entend bien, à partir de la capitale, peser suffisamment sur la France tout entière.

 

Le pouvoir culturel au service de la prise de pouvoir politique

 Dès cette époque, je suis consciente que les idées fascisantes font les choux gras d’une certaine presse et maisons d’édition où j’y vois une volonté politique car le totalitarisme de la pensée n’est possible qu’avec la collaboration effective de la puissance d’Etat. J’exprime mes inquiétudes auprès de diverses personnalités sans toujours provoquer l’attention souhaitée. Pourtant, Monsieur Giscard d’Estaing fait grand cas de la mouvance nouvelle droite (euphémisme pour dire droite extrême); le n°6 de la revue « Eléments » publie la lettre de remerciements du Président pour le soutien du GRECE (toujours la Nouvelle Droite) à son élection en 1974. Gérard Longuet venu du GUD (extrême-droite étudiante) va devenir l’un des proches du Président. Le 28.02.1981, V.G.E donne la première interview de sa campagne présidentielle au Figaro Magazine dont le P.D.G., Robert Hersant, n’est pas un nouveau venu dans l’extrême-droite. En 1940, il dirigeait « Jeune Front » profasciste.

 Après l’échec de Giscard d’Estaing en 1981, la droite nouvelle et sa multitude de groupuscules décident de revenir à sa clientèle naturelle, celle du RPR. Nombreux seront les candidats de la droite ultra sur les listes du RPR tels à Dreux, J.Pierre Stirbois du F.N ou à Antony, J.Yves Le Gallou, numéro 2 du « Club de l’Horloge ». Sur le plan de la politique culturelle, il s’agit de s’approprier à droite les valeurs républicaines classiquement à gauche et de changer de langage pour se donner un visage correct... Cela a si bien pris que trop d’électeurs en 1995 ont cru dans le slogan « égalité des chances » pour redresser une société d’injustices alors que cette droite est contre l’égalitarisme comme on pouvait le réaliser dans l’interview de Bernard Debré donné au Quotidien de Paris le 31.01.1983, article qui va provoquer le titre de la couverture du journal Le point du 9.05 de la même année : « La France, le danger égalitaire ». 

 En 1985, dans l’avion qui nous ramène à Paris après la Foire Internationale du Livre à Moscou, je confie à Monsieur Jondeau, Président des Ed. Ouvrières, le manuscrit que je publierai en 1994 sous le titre final Fantasia dans la ville. M. Jondeau est très intéressé par le manuscrit mais il exprime un grand souci : ce livre pose un problème avec les futures législatives de 1986 où Monsieur Chirac deviendra Premier Ministre, par suite ce livre ne pourra être distribué. Néanmoins, M. Jondeau soumet le synopsis du livre au comité des Ed. Ouvrières (devenues les Ed. de l’Atelier après bien des difficultés) mais je n’ai pas eu besoin de réponse écrite pour savoir que le risque éditorial ne sera pas pris puisque risque il y a.

 En 1987, alors que Monsieur Chirac est Premier Ministre, une commission créée par la Ville de Paris interdit l’achat, par les bibliothèques dépendantes de la capitale, des livres pour jeunes qui parleraient des banlieues, des problèmes du monde du travail, de familles divorcées

 

Vers un contrôle renforcé.

 Pour ce qui est des trusts de la presse, de l’édition, de la distribution (films inclus), l’essentiel est concentré à Paris. Depuis 1980, le Salon international du livre est désormais à Paris alors qu’il était à Nice où les petits éditeurs étaient un pôle d’attraction en raison de leur capacité imaginative. Pour y mettre bon ordre, les trusts ont obtenu du Maire de Paris que le dit salon se passe dans la capitale, les prix prohibitifs des emplacements ont chassé les petits éditeurs et l’insipidité des colloques programmés a enterré toute vitalité intellectuelle.

 Cette concentration s’est accrue pendant les 14 ans de mitterrandisme. Avant mai 1981, une plainte a enfin été enregistrée contre Robert Hersant qui, contrairement à ce qu’autorise la loi, détenait 20% de la presse française. La gauche au pouvoir fait une nouvelle loi sur la presse ce qui amnistie M. Hersant puisque la concentration qu’il a réalisée est avant cette nouvelle loi. Avec Jack Lang, le mot culture est remplacé par industrie culturelle. Les bibliothèques ont été invitées à lancer des offres de marché sur le principe d’acquérir les livres au meilleur prix. Seules les librairies dépendantes des trusts peuvent faire des remises signifiantes et vendent les livres produits par ceux-ci. Avec cette formule, tout un pan des bibliothèques est désormais fermé à la littérature « différente ».

 Le Cercle de la Librairie à Paris met à la disposition des libraires, pour qu’ils connaissent les nouvelles publications, un service Minitel Electre 36-15. Je puis dire que, grâce à ce service, la petite édition sort de sa distribution confidentielle car il reste des libraires attentifs à des nouveautés d’où qu’elles viennent; encore faut-il que le nouveau titre s’inscrive rapidement sur Minitel car est considéré comme nouveauté par les libraires, un livre de moins de 3 mois d’existence. Ensuite, il n’est commandé par les libraires que si un acheteur le réclame. Certes, je n’ignorais rien des difficultés en publiant un livre sur la jeunesse dans les banlieues d’autant que Monsieur Chirac était pressenti Président et, en monarchie élective, il faut plaire au Prince lequel a posé cette question au journal Le Monde le 25.11.1971 : « Le régime parlementaire n’appartient-il pas au passé? ». Il faut dire que les maux de société ne sont pas un sujet mobilisateur. Monsieur Chirac a vendu du rêve, propos tenu par Madame Simone Veil dans la Marche du siècle le 10 mai 1995 ce qui a garanti le succès électoral du candidat. Ce fait n’est pas nouveau, ce fut vrai lors des présidentielles de 1974 et celles de 1981.

 Certains m’objecteront que des livres sur les banlieues existent. Sans doute. Mais étudiez le contenu. A la limite, faire du père Guy Gilbert (qui colporte le Dieu d’amour chez les loubards) ou du Kouchner (qui fait de l’humanitaire sur les terrains de guerre mais ne s’oppose pas au budget militaire) est une chose, faire apparaître les causes du mal social en est une autre. Présenter les jeunes dans les banlieues comme des laissés-pour-compte pour lesquels on peut avoir un regard d’humanité est un délit. Publier dans la presse des documents vrais avant qu’une affaire soit jugée est bien devenu un délit, cette nouvelle limite faite à la presse empêchera bien des inculpations lorsqu’il s’agit de personnalités en vue.

 D’une manière générale, j’affirme que Sartre disparu, ce n’est pas une place vide qu’il a laissée, c’est une place supprimée. Il n’y a de places pour quiconque (sauf moyennant finances et convenir à l’idéologie dominante). Monsieur Alphonse Kienzler, à le tête d’un cabinet médical et ex-conseiller général du Haut-Rhin, n’a trouvé personne pour publier son témoignage sur son vécu pendant la Seconde Guerre Mondiale, même pas à La Nuée Bleue (DNA). C’est face à l’itinéraire exceptionnel conté dans ce manuscrit et à son humanité que je l’ai publié. Je ne l’aurais pas fait s’il n’y avait eu tous ces refus car j’estime que ce récit, sur les prisons pour les politiques sous Vichy et l’itinéraire des survivants du train de la mort valait mieux qu’une publication dans la microédition.

 

La région et les maux du temps.

 Ceci me fera conclure sur la responsabilité des élus en région. Le nec plus ultra est le parler alsacien avec ses dialectes différents qui accroissent l’enclavement si bien que le Professeur Wackenheim, a pu célébrer, lors d’une Foire du Livre à Marlenheim, l’oraison funèbre du français. La ville de Strasbourg a trouvé un fonds de trésorerie pour mettre les plaques des rues et places dans les deux registres linguistiques. J’ai un doute profond sur cette mesure qui répondrait au principe identitaire lequel doit, en premier lieu, résoudre ses propres contradictions. Quand je vois des communes alsaciennes, de parler essentiellement alémanique, opulentes et sans immigrés, voter entre 22 et 32% sur le slogan Mit Leidenschaft, Franzose sein ! Le Pen, Präsident, je me dis qu’aucune politique régionale n’a fait l’autopsie du mal dont souffre les Alsaciens pour qu’ils aient besoin de crier en nombre qu’ils sont passionnément Français ! Pourtant, c’est le vote alsacien qui a fait basculer le « oui » français pour Maastricht alors que la droite ultra est opposée à ces accords. Nous nageons dans l’incohérence totale sauf si, avec le journaliste et écrivain Martin Graff, nous convenons que les Alsakons ont fait un vote européen pour ne pas déplaire aux Allemands et qu’ils continuent à dépenser leurs marks en Alsace !

 La régionalisation est caricaturale, l’assemblée régionale n’a pas de pouvoir législatif, d’ailleurs nos élus ne le demandent pas. Pour peu qu’ils soient aussi députés, ils savent que le parlementarisme français est purement formel, le gouvernement peut légiférer par décrets et ordonnances et ses propositions de lois passent avant celles de l’Assemblée. C’est ainsi que nous assisterons au démantèlement de la sécurité sociale, de l’éducation nationale et ainsi de suite. L’Alsace qui a fait l’expérience de la dictature hitlérienne ne dit rien, peut-être que les Alsakons se vengent en aidant la France à mettre des hommes à poigne au pouvoir. Ainsi, s’il y a dérive fascisante, c’est la France entière qui protestera que c’est « Malgré Elle ».

 Mais je crois davantage à un amour immodéré pour le goût du chef incarnant l’ordre. Le dirigisme parisien ne dérange pas si bien que la politique locale culturelle consiste, avant tout, à inviter et à financer la venue d’écrivains estampillés à Paris. S’il est fondé que le public en région sache ce qui se fait et se publie dans la capitale nationale, par contre cette politique unilatérale encourage exclusivement ce qui se pense et se publie avec l’aval parigot, le plus proche du pouvoir. Ces manifestations importées de Paris sont financées par les contribuables, pour servir des entreprises monopolistiques : la Librairie Kleber apppartient à Gallimard et au trust de la diffusion et distribution qui s’y rattache, la revue Saisons d’Alsace appartient aux DNA. Quelques étudiants protestent et distribuent les libelles fort bien tournés.

 Ce soubresaut critique n’est qu’épisodique. Je prends en considération que si l’âge pour présider les destinées de la France est 63 ans, ce n’est que d’ici 10 ans que nous serons débarrassés de ceux qui ont été pétris dans leur jeunesse par le national-socialisme et le pétainisme, il faut compter aussi avec ceux qui ont le droit de vote et appartiennent à cette même génération que l'on dit les néo conservateurs. Il y a peu, un ancien déporté et militant au Mouvement de la Paix me rappelait l’extermination des forces progressistes pendant la Seconde Guerre Mondiale et ce manque pas encore comblé, il faut tant d’années pour former un homme pour qui la liberté passe par le courage !

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